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  • Marie-Noëlle Grison et Francesca Mariano

Dans les coulisses de la BnF avec Rémi Mathis !


Comme nous vous vous l'annoncions dans un billet précédent, nous avions rendez-vous le 24 janvier dernier avec Rémi Mathis, Conservateur au Département des Estampes de la BnF, pour une passionnante interview. Dans les bureaux flambant neufs du site Richelieu, nous avons parlé actualités, recherche, numérisation, perspectives et création...

Curieux d'en savoir plus ? Bonne lecture !

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Ars Graphica Paris : Le chantier de rénovation du quadrilatère Richelieu vient de s’achever pour la première phase de travaux. Comment vit-on tous ces mois de fermeture et comment s’organise la vie du département lorsqu’il n’est plus accessible au public?

Rémi Mathis : Pendant tous ces mois, nous avons bien sûr beaucoup travaillé au déménagement en lui-même, qui était préparé en amont au sein du Projet Richelieu, de façon transversale, mais aussi au sein du Département, par des personnes qui avaient fait un travail préalable pour mesurer les différentes cotes, notamment. Ensuite, pendant cette période, nous avons travaillé pour garantir que toutes les conditions de parfaite conservation soient réunies au sein des nouveaux magasins, qui sont prêts à accueillir nos collections existantes, ainsi que les accroissements futurs. Du point de vue d’un conservateur, cela implique aussi que durant tous ces mois, l’on passe beaucoup de temps sur ces sujets, et moins sur le travail de fond… mais cela en valait la peine pour tout le monde !

AGP : Comment avez-vous préparé en amont le transfert des collections ? Combien d’œuvres étaient concernées par ce déménagement ?

RM : Le projet a été pris en charge par notre directrice adjointe, Corinne Le Bitouzé, et Loïc Le Bail, chef du service conservation et communication : de gigantesques tableaux Excel ont été créés, en fonction des différents formats de documents à déplacer (grands et très gransd formats, folio, in-4°, in-8°, boîtes de conservation…), et selon le type de rangement (vertical ou horizontal), soit un véritable travail de régie. Cela nous a donné l’occasion de réaliser des modifications qui auraient été infaisables en temps normal : nous avons par exemple passé à la Réserve tous les documents des collections Marolles et Béringhen, soit le noyau de nos collections anciennes. Pour des raisons de conservation - ce sont des volumes reliés, très lourds - nous avons décidé de les ranger à plat, ce qui n’est pas sans conséquence sur l’espace disponible en mètres linéaires. Quant au nombre d’items concernés par ce déménagement, il est très compliqué d’avoir une estimation exacte : l’ensemble du Département conserve 12 à 15 millions d’œuvres, ce qui n’est pas forcément très parlant, puisqu’il existe des œuvres de toutes les tailles, de toutes natures (albums, documents reliés, estampes « à la feuille »…), et d’intérêt scientifique varié, mais cela représente des centaines et des centaines de mètres de rayonnages !

AGP : Quelles sont les nouveautés, concrètes et visibles au quotidien dans votre Département, à l’issue de cette première phase de chantier?

RM : Tout d’abord, au quotidien, cela facilite grandement le travail dans les magasins ! En effet, toutes les œuvres sont remises dans l’ordre des cotes, ce qui n’était pas le cas auparavant. Il fallait donc une certaine expérience du Département pour s’y retrouver sans perdre trop de temps. Nous avons des magasins superbes, avec des espaces pour travailler confortablement. Toutes les normes climatiques y sont respectées. Aujourd’hui, les magasins principaux se trouvent aux 7e et 8e étages du bâtiment, côté rue des Petits-Champs ; les grands formats sont rangés sous les toits, et nous avons d’autres magasins au 6e étage également. Nous avons aussi gagné en sûreté des réserves, puisque l’ensemble des documents se trouve désormais dans des espaces sous clefs.

AGP : Quels sont les objectifs de la deuxième phase de travaux ?

RM : Tout refaire au Département des Estampes ! Les objectifs sont larges : nous nous trouvons dans un hôtel particulier du XVIIe siècle, qui a été largement refait durant le XXe siècle puisque la salle de lecture du Département, par exemple, n’a été aménagée à son emplacement actuel que dans les années 1940. Depuis cette période-là, rien n’avait véritablement changé… à mon arrivée en 2010, l’on y trouvait encore des interrupteurs en porcelaine ! Donc, évidemment, une vaste remise aux normes s’impose. Nous avions aussi des soucis d’aménagement, puisque le nombre de collaborateurs du Département s’est accru, dans des espaces qui n’étaient pas extensibles. Nous allons même pouvoir investir des espaces, qui n’étaient pas auparavant au Département, notamment l’atelier de restauration du département des Cartes et Plans.

AGP : En terme de communicabilité des documents, le chantier de rénovation a-t-il apporté des améliorations, par exemple en rendant plus facilement accessibles certains fonds ? Si oui, lesquels ? Si non, lesquels ?

RM : Je risque de vous décevoir ! Notre fonctionnement, jusqu’en 2020, sera un fonctionnement provisoire, dans une salle de lecture [la salle Labrouste] qui n’est pas destinée à rester la nôtre. Cette salle est plus loin des magasins, ce qui complique la communication des documents. Concrètement, pour nos lecteurs, cela se traduit par un peu plus de rigidité dans le service que nous leur rendons, puisque dorénavant nous avons un système de levées à heures fixes pour les bulletins de demandes de communications. En revanche, nous gagnons en service sur la Réserve, qui est maintenant ouverte trois fois trois heures par semaine, contre deux fois deux heures auparavant. Des contraintes demeurent toutefois pour les grands formats, qui ne sont communiqués que sur rendez-vous à partir du format 4.

AGP : Y a-t-il des fonds qui resteront incommunicables jusqu’à la toute fin des travaux sur le site Richelieu ?

RM : Non, tout est communicable. Une partie des fonds demeure à Tolbiac et à Bussy-Saint-Georges mais cela était déjà le cas avant les travaux. Pour les trois années à venir, les conditions de communication restent donc inchangées.